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En Gironde, le festival Uzeste musical et son tempo mystérieux

Uzeste, c’est ce bled, en Gironde, au sud-est de Bordeaux, dans la haute lande aussi déshéritée que poétiquement puissante, ce bled que son illustre rejeton, le batteur et chanteur Bernard Lubat, est revenu habiter en famille, après une carrière aussi éblouissante que fructueuse (il a joué, avec Stan Getz, Eddy Louiss et d’autres, du jazz, de la musique contemporaine, de la variété, etc.), « pour ne pas devenir un couillon du jazz ».
Uzeste, c’est ce village charmant qui a même déjoué le piège du pittoresque. Chaque maison a sa marque du festival Uzeste musical, dont la 47e édition est organisée du samedi 17 au samedi 24 août, ou sa discrétion. Les traces du plasticien Jacky Liégeois sont partout. Même dans l’exquis lettrage des tee-shirts du Café des sports. Jacky Liégeois est parti cet hiver, comme Me Alain Amanieu, poète, notaire surprenant, ancien président du festival ; Joël Boudé, compagnon de route ; et Sylvain Luc, guitariste internationalement reconnu, Uzestois fidèle, mort mercredi 13 mars, à l’âge de 58 ans.
Uzeste musical, festival délicieusement serein et déconnant, lieu de recherches tous les jours, se reconnaît autant à ses vibrantes célébrations de la vie qu’à ses peines profondes. Ont-ils des souvenirs de la première édition, en 1977, où Colette Godard était présente pour Le Monde ? « Non, fait Lubat, on n’est pas dans la nostalgie, ce nom de médicament… On va vers le futur… Je ne sais plus comment ça a commencé… Ici, on commence tout le temps.  » L’envoyé du journal Sud Ouest insiste : « A quoi ressemblera Uzeste musical 2024 ? » Lubat : « Ce sera pas du plein la vue. C’est pas du plein les poches, c’est du plein la vie. On n’a rien à vendre, on a tout à vivre. »
On croit d’abord à un jeu sur les mots, une embrouille : Lubat dans ses basques, son écoute bouffonne de chaque son, chaque syllabe. « On n’est pas dans la compétition, on n’est pas des “compétomanes”… On invente de la musique, de la parole, du verbe, de la poésie avec les plus grands artistes que les gens ne connaissent pas plus qu’Uzeste, puisque les télévisions et les radios ne les font pas connaître. Télés et radios font connaître des mecs qui sont des marchandises. L’anagramme de “star”, c’est “rats”. »
Le plus incroyable, c’est que c’est vrai. Le village semble toujours sortir d’on ne sait quelle sieste. Plein de petits trucs, ou de très grands, se succèdent selon un tempo mystérieux. Le film d’Olivier Azam sur André Minvielle, L’Homme à la manivelle, présenté dimanche 18 août. Ceux de Jocelyne Saab (1948-2019) consacrés à la résistance palestinienne (période 1974-1982), et la projection d’Ithaka, le combat pour libérer Assange, un documentaire (2021) de Ben Lawrence, suivie d’une discussion avec Rony Brauman, l’a-t-on ratée ? Le débat, « De quoi l’Uzeste musical est-il poïélitique ? », avec l’infatigable Lubat ; Fabrice Vieira, son directeur artistique ; et Alain Delmas, syndicaliste, coprésident d’Uzeste musical, où était-on ?
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